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Journal du (re)(re)confinement

Une initiative (encore et toujours aussi) originale

Jour 3.18

Jour 3.18 : reprise du télétravail après trois semaines d’arrêt maladie. C’est en effet une constante des trois confinements : me surprendre alors que je ne travaille pas (et alors que je dois aller en Italie mais c’est une autre histoire). Si vous le souhaitez, je vous préviendrai de mes absences professionnelles et de mes voyages ultramontains pour que vous puissiez prévoir les prochains confinements. Lors du premier, j’avais repris le travail le 13ème jour. Lors du deuxième, le 14ème jour. Cette fois-ci c’est le 18ème jour. Je suis de plus en plus paresseux.

 

Réveil 6h30. Série de pompes, d’abdos et d’étirements. D’une main, je trempe ma tartine de petit épeautre dans ma tasse de café équitable, et de l’autre je relis la Phénoménologie de l’esprit. Je ne suis définitivement pas convaincu par la traduction de Jean-Pierre Lefèbvre.

 

J’ai mal dormi cette nuit, tout excité à l’idée de commencer une nouvelle aventure [ça et parce que j’avais peur du noir, comme petit ours, alors que Sophie est quand même plus tranquille avec sa courge. Et aussi parce que je n’arrête pas de penser à Eva Green coincée dans son canal]. Et maintenant, que vais-je faire de tout ce temps, QUE sera ma vie ? Pour marquer le coup, je m’habille, me rase, me brosse les dents, et décide de laver mon pyjama.

 

7h50, je me connecte : je veux être fin prêt pour 8h tapantes. J’imagine que mes collègues doivent être rassurés de me savoir de retour. Ça a dû rendre un peu plus léger leur lundi de Pâques confiné. Moi-même, cela me fera plaisir de revoir, même à distance et sans visio, leur visages radieux et épanouis.

 

8h : je suis devant mon ordi, fébrile [mais pas au sens où il faut appeler son médecin traitant, calmez-vous, j’ai donné], et guette les connexions sur la messagerie instantanée.

 

8h52 : un premier collègue se connecte. Je tente un « coucou », mais il se déconnecte aussitôt. Fausse alerte. Un problème de connexion peut-être. Mon apostrophe était-elle trop familière ? Où sont-ils tous passés, eux, d’habitude sur le pont dès potron-minet ? Il est vrai qu’on sort – encore et toujours – du changement d’heure, mais tout de même. Pour m’occuper, je fais du tri dans des vieux dossiers. Je retombe, ému, sur les photos d’une conférence à Amsterdam en 2014, que je n'avais pas consultées depuis le 2ème confinement : ambivalent témoignage d’une époque peut-être révolue.

 

9h36 : des gens importants commencent à se connecter. Je décide de ne pas les embêter tout de suite, et choisit de leur laisser le soin de me contacter le moment venu. Ils doivent de toute façon être soulagés de mon retour, qui les déchargera d’une quantité importante de travail. J’estime que le moins que je puisse faire est d’adapter mon emploi du temps aux contraintes de ceux qui ont plus de responsabilités que moi.

 

10h12 : je remplis ma déclaration en ligne des jours de télétravail exceptionnel (par opposition à régulier, occasionnel, fortuit, impromptu, qui sont d'autres catégories administratives de télétravail).

 

11h04 : je découvre les nouvelles consignes. Si jamais je veux absolument venir au travail, pas plus d’une journée par semaine, je dois demander l’accord de la hiérarchie et disposer d’une attestation spécifique de mon employeur même si ce n’est pas exigé par les textes. Visiblement, ceux qui militaient d’arrache-pied pour le retour de l’attestation sont dans mon entreprise…

 

11h24 : c’est déjà l’heure de la pause méridienne. Je n’ai pas vu la matinée passer. Comme quoi, les réseaux sociaux ont bien raison : l’important pour survivre est de se doter d’un cadre structurant. Je relis la note RH interne actualisée « comment bien (re)(re)vivre son (re)(re)télétravail en (re)(re)confinement », qui (re) (re)reprend quelques grands principes pour se confectionner un déjeuner diététique. Blanc de poulet/courgette : voilà un menu qui me paraît adapté. En fond sonore, la 3ème symphonie de Brahms remplace avantageusement l’habituel brouhaha de la cantine.

 

13h55 : je me reconnecte. Parmi les nouvelles recommandations émises pour mieux vivre le télétravail, il y a en a une qui a retenu mon attention : faire une vraie pause déjeuner. Je m’y suis donc conformé, non sans mal.

 

15h32 : je parcours nonchalamment quelques revues de presse. Le monde ne s’est pas arrêté de tourner en mon absence.

 

17h13 : je reçois un mail des RH qui m’expliquent que les annulations de congé sont interdites en raison du confinement, parce que les temps sont durs et qu’il faut qu’on se repose même si on ne peut pas partir et qui si après on se met tous à partir en même temps il n’y aura plus personne pour tenir la boutique. Ça se tient. Sauf qu’ils nous expliquent également qu’étant donnée la modification des vacances scolaires on a quand même le droit de déplacer nos congés si on veut mais dans la limite des trois prochaines semaines et avec accord de la hiérarchie. J’ai rien compris.

 

A 19h30, je me déconnecte, fatigué, mais heureux. Je fais quelques tractions avant le dîner. Je me prépare une soupe de chou kale. Je m’endors avec la satisfaction du devoir accompli.

 

Et puis un soir, dans mon miroir, je verrai bien la fin du chemin.

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