Jour 8

Jour 8 : cela ne transparaît certainement pas à la lecture de ce journal, écrit à l’encre de la pudeur et de la retenue tout en modestie, mais il n’est pas impossible que je me sois un peu laissé aller ces derniers temps. Je décide de me ressaisir.

Ça tombe bien, le ministre de l’agriculture a suggéré aux inactifs d’« aller dans les champs » pour aider les agriculteurs dans leurs menus travaux. En plus, j’adore les asperges et les fraises gariguettes. Plein d’enthousiasme, je cherche la case « reconversion paysanne » sur l’attestation de déplacement dérogatoire, mais elle n’existe pas. On dira que je me rends sur les lieux de ma nouvelle occupation professionnelle.

Deuxième problème : pour sortir, il faut s’habiller. J’ai un peu oublié tout ça. Je dois avoir quelque part un panier de linge sale : j’y récupérerai bien deux ou trois trucs.

Troisième difficulté : où trouver un champ ? Ça ressemble à quoi ? Et puis je ne connais pas le jargon technique : est-ce qu’il suffit d’arriver en disant « Bonjour, je viens repiquer des poireaux » ? Le provincial est parfois facétieux, j’ai un peu peur de me prendre une décharge de chevrotine (c’est comme ça qu’on dit ?).

Bref, à la réflexion, ce plan me paraît semé d’embûches. Je reste un patriote : je servirai mieux mon pays en regardant un épisode de The Big Bang Theory sur Netflix.